VALENTIN VALETTE

Ashes of the Ariabian's pearl

GALERIE DU MUSÉE DE LA PHOTOGRAPHIE

Prix Satellite 2024

VERNISSAGE

vendredi 27.09 I 18h30

Le 10 janvier 2020, le Sultanat d’Oman déplore la mort de Qābūs Bin Sa‘īd Āl-Būsa‘īdī, monarque adulé dont le règne de cinquante ans aura été marqué par sa longévité, record absolu dans le monde arabe. Ces années durant, Sultan Qābūs s’est façonné une stature de fondateur de l’Oman moderne, dévoué à développer rapidement le pays grâce à la manne pétrolière et poussé par le mythe de la « nahda » ou « renaissance ».

Dès sa prise de pouvoir en 1970, les flux migratoires de travailleurs asiatiques n’ont cessé d’augmenter, atteignant de nos jours 40% de la population.

Pour contrer cette quasi-égalité démographique, Sultan Qābūs, épris de nationalisme, mis en oeuvre dès 1988, un plan d’ « omanisation » – encore en vigueur aujourd’hui – visant à réduire la dépendance du pays vis-à-vis de la main-d’oeuvre étrangère.

Au cours de son règne, tandis que les flux migratoires de travailleurs asiatiques ne cessaient d’augmenter, les ressources pétrolifères et gazières, elles, continuaient de s’épuiser. Peu avant sa mort, cette situation conduit Qābūs à concevoir une nouvelle politique de développement, connue sous le nom de : « Oman vision 2040 ». À présent, c’est désormais à son cousin, l’actuel Sultan Haïtham Ben Tariq, que revient la charge de poursuivre le travail entamé.

Entre la fin d’un règne couronné de succès pour Sultan Qābūs et le commencement de celui d’Haïtham, « Ashes of the Arabian’s pearl » tient à interroger cette période de transition monarchique, matérialisée par un besoin urgent de diversification économique au regard de l’amenuisement des ressources pétrolifères et gazières. Pendant près de trois ans, de 2021 à 2023, ce projet documentaire est né d’un désir d’observer de près la dynamique de développement économique et le devenir subjectif de cette monarchie du Golfe.

Cette recherche photographique invoque ainsi le temps passé – le temps glorieux de Qābūs – en mobilisant une notion de géographie urbaine, le tomason, qui se veut être un outil pour désigner une catégorie singulière d’ob jets, d’espaces, de bâtiments, qui nous intriguent car ils ne semblent pas à leur place, dont on sait qu’ils sont un reste du passé, oublié. Mais quel passé ? Pourquoi sont-ils là ? À quoi servaient-il ? Combien de temps resteront-t-il ? Ces signes mémoratifs renvoient au lien existant entre l’espace – celui de l’aménagement territorial – et le temps – celui du règne glorieux de Qābūs – dans les processus nostalgiques et mémoriels.

« Ashes of the Arabian’s pearl » s’est en outre penchée sur la vie de milliers d’hommes, force ouvrière et bâtisseurs du pays, issus principalement de l’Inde, du Pakistan et du Bangladesh. Ce projet a eu le souhait d’illustrer leurs rôles majeurs dans la politique de développement en cours tout en rappelant leurs conditions de travail bien souvent délaissées par les décideurs et entrepreneurs omanais.

Car les travailleurs ne sont pas les seuls acteurs de ce développement, ce projet documentaire entend aussi donner à voir, à contre-courant des salariés, les modes de vie en vigueur des entrepreneurs omanais et leurs familles.

Il s’agit finalement de faire dialoguer deux catégories de populations entre-elles, celles qui emploient et celles employées. Une série de portraits souligne ainsi les connexions et les modes de hiérarchisation qui s’incarnent dans ce phénomène de migration de travail mondialisée.

« Ashes of the Arabian’s pearl » se veut pluridisciplinaire en combinant un corpus d’archives (lettres de démission, visas annulés, ordonnances et rapports médicaux, bulletins de salaires, régimes alimentaire, circulaires, relevés d’horaires, etc.), des enregistrements sonores, des objets retrouvés sur les camps de travail abandonnés -photographiés en studio sous forme d’inventaire-, (outils de travail, vêtements, cartographies, objets intimes, etc.), et un ensemble de plus de cent photographies moyen-format.

À l’image du Sultanat d’Oman, ce projet se situe donc à la lisière d’une double temporalité, devenant ainsi un pont entre passé et présent.

Valentin Joseph Valette – né le 11 mars 1994, dans les Pyrénées-Atlantiques est un photographe doctorant en anthropologie visuelle, basé entre Tunis, Béjaïa et Marseille. 

Animé à la fois par ma pratique photographique et mes études en Sciences Humaines et Sociales, je m’intéresse au médium photographique en tant qu’instrument de recherche. Mon intérêt pour les Mondes arabes et musulmans, alimenté par mes études de sociologie et de sciences politiques au sein de l’Institut d’Études Politiques de Sciences Po Aix-en-Provence, me conduit aujourd’hui à vivre entre la Tunisie, l’Algérie et la France. En 2021, j’ai rejoint l’Institut de Recherche pour le Développement en Tunisie (IRD) au sein du programme de recherche Territoires Urbains et Gouvernance de Crise (TURGOCRISE) du CNRS pour lequel j’ai réalisé un film de recherche, en cours de montage, et une enquête sociologique. 

Dans ce cadre-là, j’effectue depuis 2023 une commande photographique pour Médecins du Monde sur la thématique de la santé en migration des harragas. En parallèle, je développe depuis 2021 un projet photographique au long cours « Ashes of the Arabian’s Pearl » sur l’aménagement territorial et le développement économique au Sultanat d’Oman, qui soulève des concepts géographiques comme des questions migratoires. Je travaille actuellement sur l’édition de mon premier ouvrage photographique avec une maison d’édition et la diffusion du projet. Ce projet a été présélectionné pour le Leica Oscar Barnack Award 2024, le Kolga Tbillisi Award 2024, le PhMuseum Award 2024, l’Art Photo Biennale Barcelona Award 2024 et le Belfast Photo Festival 2024. Début 2024, j’ai obtenu un financement pour un projet doctoral en anthropologie visuelle intitulé « les Harkis et l’Algérie : liens, expériences et circulations » qui se situe à la croisée de la sociologie des migrations, des mémoires et des appartenances. Je suis rattaché aujourd’hui à l’Institut de Recherche sur le Maghreb Contemporain (IRMC) en Tunisie et à l’Institut d’Ethnologie et d’Anthropologie Sociale (IDEAS) d’Aix-Marseille Université. Depuis plusieurs années, je partage mon temps entre commandes photographiques, projets personnels au long cours et implication académique. À côté de mes activités dans la recherche et les arts visuels, je tente de développer le fond photographique de Jean Depara, artiste photographe congolais des années 1950-1970, dont j’ai eu la chance de retrouver les négatifs.

QUAND ?

27.09 > 3.11
mar – dim : 10h30 – 12h30 & 13h30 – 18h

Vernissage
ven 27.09 > 18h30

COMMENT ?

Tramway (ligne 1) : arrêt Opéra – Vieille Ville